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[INTERVIEW] DYSFONCTIONNEMENTS DES FÉDÉRATIONS : « PLUS PERSONNE NE POURRA DIRE QUE TOUT VA BIEN », PRÉVIENT SABRINA SEBAIHI


La commission d'enquête sur les dysfonctionnements des fédérations en a fini avec la phase des auditions, le 23 novembre. Avant le rendu de son rapport le 19 décembre, 20 minutes fait un retour en trois parties sur ce qu'il s'est dit lors des 90 entretiens menés et les pistes d'amélioration envisageables.

► 2ème partie : Dysfonctionnements des fédérations : « Plus personne ne pourra dire que tout va bien », prévient Sabrina Sebaihi

La députée des Hauts-de-Seine témoigne de sa stupéfaction après avoir entendu (quasiment) tous les plus hauts dirigeants du sport français dans le cadre de la commission d'enquête sur les fédérations.

Elle a assisté à toutes les auditions, assise à la droite de la présidente de la commission Béatrice Bellamy, oreille attentive pour les victimes, prompte à mettre les personnes aux responsabilités face à leurs contradictions. La rapporteure Sabrina Sebaihi (Europe Écologie Les Verts) témoigne de sa surprise concernant l'ampleur des affaires de violences, notamment sexuelles, passées sous silence pendant des années. Et se dit sidérée de la légèreté avec laquelle les dirigeants ont trop souvent traité ces problèmes.

- Interview de la rapporteure Sabrina Sebaihi :

Après 90 auditions, sortez-vous renforcée dans l'idée que cette commission d'enquête était nécessaire ?
Complètement. Quand on nous dit au tout début que tout va bien dans le mouvement sportif, que des textes de lois ont été votés et ont tout changé, et qu'on se rend compte au bout que les outils phares du ministère des Sports, par exemple la cellule Signal-sport, sont méconnus de tous et notamment des victimes, ça prouve l'utilité de cette commission. On ne s'était pas dit au départ qu'on allait entendre autant de monde, mais au fur et à mesure, de nouvelles personnes nous ont paru intéressantes à écouter. Et des témoignages nous ont alerté sur des fédérations qui étaient passées sous les radars et qui sont apparues comme étant problématiques.

Par exemple ?
L'équitation. On a interrogé longuement le président de la fédération, et quand au bout d'une heure il nous explique qu'on perd du temps avec « un voleur de pommes » en parlant d'une personne qui a été condamnée pour un rapport sexuel avec une mineure, ça montre une certaine mentalité. Pour moi, c'est vraiment la quintessence de l'ancien monde au sein du mouvement sportif.
Avez-vous une vision plus précise sur les causes des dysfonctionnements ?

C'est plus clair, mais il y en a tellement que c'est terrifiant. Des choses qui semblent évidentes à l'extérieur, comme tenir des propos homophobes ou racistes que tout le monde condamnerait dans la société, sont considérées comme normales, comme du folklore, dans une enceinte sportive. J'espère que notre regard extérieur leur a permis de se rendre compte que non, ce n'est pas normal.
C'est ce qui manque au monde du sport, sortir de cet entre-soi ?

Les victimes l'ont dénoncé, c'est l'un de leurs principaux reproches. Quand elles ont voulu parler, on leur a dit qu'il ne fallait surtout pas le faire car ça allait nuire à l'image du club, de leur discipline, de la famille du sport. Ou alors elles n'avaient pas confiance en ceux qui allaient mener les enquêtes car tout le monde se connaît. Concernant le judo par exemple, les mots utilisés ont été très forts : elles parlaient de mafia, de secte.
Ces auditions vous ont-elles surprises ?

Ce qu'on a découvert, toutes ces affaires, dépasse largement ce pour quoi la commission avait été créée. Le plus grave de mon point de vue est qu'on a eu face à nous des dirigeants qui pensent qu'ils n'ont pas de compte à rendre, ou alors qui n'ont jamais eu à en rendre, et qui sont donc venus sans avoir préparé leur audition. Dans les deux cas, c'est grave : dans le premier, ça veut dire qu'ils s'estiment au-dessus de tout ; dans le deuxième, que le ministère des Sports est défaillant dans le contrôle et le suivi de ces fédérations.
Ces dirigeants ont-ils davantage fait preuve face à vous de mauvaise volonté ou de légèreté ?

Certains ont vraiment fait preuve de mauvaise volonté. Ils sont venus à reculons, ils ne voulaient pas nous parler, et ça a été difficile de discuter. Pour d'autres, c'est une méconnaissance et surtout un désintérêt pour ces questions, parce qu'ils considèrent qu'être président de fédération c'est de la représentation, en aucun cas relever les manches et s'occuper des affaires sérieuses qui traversent leur instance.

Quelles auditions vous ont particulièrement marqué de ce point de vue ?
Niveau mauvaise volonté, l'athlétisme [le président André Giraud et la directrice générale Souäd Rochdi], c'est évident. D'ailleurs ils sont venus une deuxième fois, ça s'est un peu mieux passé. L'équitation aussi [le président Serge Lecomte et le directeur général Frédéric Bouix], ils ne voulaient pas du tout nous parler. On a senti également Bernard Laporte très extérieur à tout ça, comme les dirigeants du football, de manière générale. Philippe Diallo [président de la FFF depuis le retrait de Noël Le Graët en janvier 2023] est venu avec un argumentaire très simple : « ce n'est pas mon bilan, voilà ma feuille de route ». Il dit qu'il n'est pas responsable des anciennes affaires, alors même qu'il siégeait au Comex et qu'il était vice-président ! On a l'impression d'avoir eu beaucoup de langue de bois. Je pense au tennis aussi [Gilles Moretton], qui a tordu les faits pendant la quasi-totalité de l'audition.

Vous aviez dit d'ailleurs après le passage de Gilles Moretton que la commission se réservait le droit de transmettre des signalements au parquet pour parjure. Allez-vous le faire, et pour quels témoignages ?

C'est intéressant, on a reçu énormément de courriers de gens qui ont suivi les auditions et qui en ont fait des rapports minutés, avec les moments où il y a des mensonges, et les preuves en dessous. C'est sur la base de ces éléments et des comptes-rendus écrits des auditions qu'on va savoir sur quelle personne on sera obligé de faire des signalements. Il faut envoyer un signal fort pour expliquer que le travail d'une commission d'enquête est extrêmement sérieux, que ce qu'ont vécu les victimes est grave, et que quand on est président d'une fédération sportive on a des responsabilités. Dont celle de dire la vérité.
On a senti votre exaspération quand certains dirigeants, par exemple André Giraud, découvrent à l'occasion de leur audition les outils à leur disposition ?

Ça paraît dingue, oui. Il ne savait pas qu'il pouvait déclencher l'article 40, ou que la fédération pouvait se porter partie civile. Le président de la gymnastique ne savait pas qu'il pouvait prendre des sanctions disciplinaires. Vraiment, on se demande s'ils ont compris le rôle de dirigeant de fédération. Mais ils ne sont pas les seuls responsables, ils sont accompagnés de cadres techniques, qui sont des agents de l'Etat. Un DTN est quand même censé savoir qui peut déclencher un article 40. On a vu comme ça des situations extrêmement surprenantes.

Vous avez des exemples en tête ?
Claude Onesta qui s'excuse pour sa dédicace à Didier Dinart avant de dire que ce n'était pas raciste. Ça montre un décalage, il n'y a pas eu de prise en compte de l'évolution de la société, ce n'est pas possible. Certaines personnes ont été très agaçantes, ont fait semblant de ne pas comprendre les questions. Ce n'est pas tant vis-à-vis de nous, c'est surtout irrespectueux pour les victimes qui ont témoigné et si ces dirigeants avaient vraiment pris conscience des choses, ils auraient écouté les auditions qui les concernaient avant de venir. Le judo c'est pareil, on a auditionné de très nombreuses personnes et Jean-Luc Rougé [ancien président de la FFJDA de 2005 à 2020] vient les mains dans les poches nous expliquer qu'il n'est pas là pour nous parler de ça…

Quelle audition a été la plus frustrante ?
On aurait aimé avoir plus de réponses de certains. Je pense au football, la FFF reste selon moi la fédération où la parole s'est le moins libérée. Quand je vois l'audition du directeur juridique [Jean Lapeyre], il lui a fallu une heure et demie pour reconnaître que tout le monde savait pour Noël Le Graët. Que de temps perdu ! On aurait pu aborder plein d'autres choses pendant ce temps-là. Mais je ne parlerais pas de frustration car chaque audition a apporté des éléments. Même celles où les dirigeants n'ont pas répondu ou n'étaient pas préparés, ce sont des informations en soi.

Avez-vous reçu des pressions pendant ces quatre mois d'auditions ?
On a reçu pas mal de courriers pour se plaindre. Le premier était celui de David Lappartient [président du CNOSF] qui disait qu'on avait caricaturé le mouvement sportif, que l'on tenait des propos outranciers. Mais la plupart des plaintes et du mécontentement nous sont arrivés indirectement. On m'a dit par exemple que la commission faisait grincer des dents, on m'a conseillé de ne plus publier mon agenda de la semaine pour être tranquille. Mais ça ne nous a pas empêchés de travailler. On sent quand même qu'il y avait beaucoup d'attention portée sur nous.

Ce qui fait d'autant plus dire qu'elle était nécessaire ?
Ce qui est certain en tout cas est qu'après ces auditions, plus personne ne pourra dire « on n'était pas au courant de ce qui n'allait pas » ou « tout va bien ». Ce n'est plus possible.

Vous avez également auditionné la ministre des Sports. L'avez-vous senti secouée par tout ça ?
Quand elle recadre le président de la fédération de gymnastique en lui disant que, bien sûr, il a un pouvoir de sanction, même elle est surprise qu'il ne le sache pas. On lui avait adressé un courrier à la suite de l'audition du directeur général de l'Insep [Fabien Canu, le 5 octobre], parce qu'on avait été étonné de ses réponses [il avait reconnu notamment un « un déficit d'information » sur les violences sexistes et sexuelles]. C'est tout de même le seul établissement sous tutelle directe du ministère des Sports. Donc on a alerté très fortement la ministre, et je sais qu'il y a un courrier qui a été adressé en retour à l'Insep pour remettre les choses en ordre. Je pense qu'elle a été aussi surprise sur la méconnaissance de la cellule Signal-sport. Elle a pu s'en rendre compte, au moins, et elle veut y remédier. Des choses qui étaient considérées comme acquises par le ministère ne l'étaient en fait pas du tout. Cette commission aura servi à les mettre en lumière, aussi.



► lire la 1ère partie

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Source : www.20minutes.fr





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